La Balade d'Amelie

Gerhard Richter à la Fondation Louis Vuitton

Du 15 octobre 2025 au 16 mars 2026, la Fondation Louis Vuitton consacre une rétrospective magistrale à Gerhard Richter, figure incontournable de la peinture contemporaine.

Plus de 150 œuvres retracent plus de six décennies d’expérimentation, de 1962 à 2024, offrant un voyage à travers l’histoire d’un regard, celui d’un artiste qui n’a jamais cessé d’interroger la vision, la mémoire et le réel.

Les premières salles accueillent les toiles emblématiques issues de photographies : scènes familiales, paysages, figures historiques.

Mais rien ici n’est tout à fait net. Le flou, signature de Richter, agit comme un voile : il transforme l’image en souvenir, la certitude en perception fragile. La peinture devient un acte de distance, une tentative de retenir ce qui s’efface.

Dans ces œuvres, la mémoire se brouille, le temps s’étire. L’artiste ne cherche pas à figer le monde, mais à le questionner : que reste-t-il quand tout vacille ?

Plus haut dans le parcours, la couleur s’impose, libre, éclatante.

Les grands formats abstraits déploient leurs surfaces raclées, leurs superpositions de pigments où chaque geste efface autant qu’il révèle. Avec 4900 Farben, Richter pousse l’expérimentation à l’extrême : une mosaïque de carrés colorés, agencés en variations infinies, qui vibre comme un champ de lumière.

Ici, la peinture devient pure énergie visuelle. Chaque panneau, chaque teinte, chaque accident de matière semble respirer. Le regard ne lit plus une image, il la traverse.

Les sculptures de verre, les panneaux d’acier poli prolongent cette exploration du visible.

Dans ces œuvres, le spectateur devient partie prenante : il se reflète, se dédouble, se dissout.

La frontière entre peinture et architecture s’efface. Richter déplace la question de la représentation vers celle de la perception.

Chaque salle invite à la lenteur. Devant un portrait flouté, un paysage dilué, une surface abstraite, le visiteur retrouve une forme d’attention rare. Rien n’est démonstratif, tout est silencieusement vibrant.


Richter peint le doute, le passage, le tremblement, une manière d’habiter le temps à la fois lucide et sensible.

Quand on quitte la Fondation, la lumière du Bois de Boulogne semble différente. Elle porte encore quelque chose du regard de Richter : une transparence, un trouble, une intensité calme.


Cette exposition n’est pas seulement un hommage à l’un des plus grands peintres vivants, c’est une invitation à voir autrement, à accepter que l’art, comme la vie, ne soit jamais tout à fait clair, mais toujours en mouvement.